« Le chemin du maréchal Sissi vers le pouvoir baigne dans le sang, celui de centaines d’Egyptiens tués dans la capitale et d’autres villes égyptiennes, et les élections présidentielles ont lieu alors que des millions d’opposants politiques égyptiens ont été jetés en prison, et il est l’ennemi numéro un de millions d’Egyptiens qui considèrent qu’il porte la responsabilité directe de la mort ou de l’emprisonnement de leurs proches ». Voilà entre autres ce que proclame une campagne politique un rien don quichottesque, lancée ce samedi, en attaquant frontalement le candidat favori des élections présidentielles du 26 juin.
Six petites organisations pro-révolution égyptiennes, dont le mouvement du 6 Avril, qui avait beaucoup contribué au soulèvement contre Hosni Moubarak, qui vient d’être interdit par un tribunal égyptien (mais qui attend encore le verdict de l’appel), viennent de lancer une campagne frontale contre le vainqueur attendu des élections présidentielles du 26 mai prochain, le maréchal Sissi.
« Contre toi« , la campagne reprend sans vergogne la rhétorique du pouvoir, qui, comme toute rhétorique anti-terroriste, explique que « si vous n’êtes pas avec nous, vous êtes contre nous ». Longtemps les petits groupes révolutionnaires ont voulu se placer dans une sorte de troisième voie et affirmer aussi bien leur opposition aux Frères musulmans qu’au régime militaire. Mais aujourd’hui, dans un climat qui ne s’adoucit pas envers les activistes de la troisième voie, considérés comme la cinquième colonne des islamistes ou des agents de l’étranger, ils ne s’embarrassent plus de nuances.
Les participants à cette campagne sont des acteurs aujourd’hui marginalisés de la scène politique comme le 6 avril, le front du chemin de la révolution, les socialistes révolutionnaires et le mouvement de résistance des étudiants.
L’image de la campagne montre Sissi pour ce qu’il est, un homme issu des services de renseignements militaires, et ne cache pas son antipathie en lui balafrant le visage.
Chaque affichette dénonce des absurdités ou des exagérations de la campagne du candidat, sur le plan social, économique – sans parler des violations en cours contre les droits de l’homme dans le pays.
Depuis la destitution par Sissi de l’ex-président Mohamed Morsi, issu des Frères musulmans, en juillet 2013, ce sont effectivement des milliers d’opposants, principalement des Frères musulmans et sympathisants, mais aussi des partisans de la troisième voie, et aussi d’après les avocats, des gens arrêtés au hasard, qui ont été emprisonnés et sont accusés de charges lourdes comme de terrorisme, et au moins 1300 personnes qui ont été tuées dans la répression des manifestations d’opposition, d’après Human Rights Watch.