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L’Egypte dans le rouge 2/3 : les solutions du maréchal Sissi

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Le maréchal Sissi avait bien prévenu les Egyptiens : lui président, il allait falloir se serrer la ceinture. Dans un contexte d’activité économique ralentie, d’un important déficit budgétaire, et d’investisseurs étrangers frileux, l’Etat égyptien cherche comment assainir son budget, en se lançant dans une politique d’austérité et en cherchant comment augmenter les recettes de l’Etat…

D’après un rapport du début de l’année de la Banque mondiale, l’Egypte se situe parmi les sept économies les plus vulnérables dans la région.

Baisse des subventions sur l’énergie

L’une des premières mesures de Sissi, fort peu de temps après son élection, à savoir la décision de couper une bonne partie des subventions sur les combustibles : essence, diesel, gaz, risque de se révèle assez impopulaire : tous les Egyptiens, y compris les plus pauvres, ont besoin d’acheter ces produits.
Les subventions sur les combustibles mobilisaient un quart ou plus du budget de l’Etat, ce qui représentait plus que le budget de la santé et de l’éducation combinés.
Qui plus est, on leur reprochait de ne pas réellement atteindre les populations nécessiteuses. Tous les Egyptiens bénéficiaient équitablement de l’énergie subventionnée : les classes aisées faisaient le plein avec de l’essence subventionnée, les industriels faisaient fonctionner les usines avec du gaz subventionné… D’après le FMI « la plupart du temps, les subventions généralisées ne bénéficient pas aux pauvres : nous avons même constaté que, dans les pays du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord, 20 % seulement des subventions alimentaires et énergétiques parviennent aux pauvres, tandis que les 80 % reshttp://blog.slateafrique.com/nouvelles-du-caire/wp-admin/post-new.php?post_type=posttants bénéficient à ceux qui n’en ont pas besoin. »

Cela fait longtemps que les économistes préconisent une réforme massive des subventions énergétiques en Egypte – voire des subventions tout court, et cela fait des dizaines d’années que le pays s’y emploie laborieusement.
Aujourd’hui le problème des subventions sur l’énergie se faisait d’autant plus pressant que la crise énergétique s’aggravait et avec elle le déficit budgétaire.

Déficit budgétaire

Les responsables gouvernementaux s’alarment d’un déficit budgétaire important – près de 14% du PIB pour l’année 2012/2013 – le budget pour l’année à venir, dans lequel le gouvernement du maréchal Sissi a inclus les réductions drastiques des subventions énergétiques, vise un déficit de 10% ou moins du PIB.

Certes il faut garder en tête que les chiffres donnés par les autorités égyptiennes sont peu fiables.
Mais pour mettre les choses en perspective, ce n’est pas la première fois que l’Egypte se retrouve dans une situation de grand déficit budgétaire.
A la fin des années 1980, le déficit budgétaire égyptien atteignait alors entre 15 et 25% du PIB, c’est-à-dire un taux plus important qu’aujourd’hui.

« L’Égypte aurait ainsi reçu, entre 1970 et 1989, plus de 47 milliards $ de crédits à long terme des pays occidentaux, dont elle n’aurait, jusqu’en 1989, remboursé que le tiers. La chute des recettes pétrolières a conduit le gouvernement égyptien à accumuler des arriérés, tant en principal qu’en intérêts, à partir de 1985 ». (Sami ‘Aziz et Françoise Clément)

Mais d’après l’OECD, le déficit budgétaire avait réussi à descendre jusqu’à 8% du PIB en 1994 après le « sauvetage » de l’Egypte par le FMI sous Moubarak à partir de 1991. Il est encore réduit les années suivantes.
Ledit « sauvetage » est d’ailleurs très controversé, à cause des conditions de libéralisation imposées à l’Egypte qui entraîné une privatisation désordonnée et, selon de nombreux détracteurs, génératrice d’encore davantage de corruption.
Les mesures financières ont été accompagnées d’annulation ou de rééchelonnement de milliards de dollars de dettes par les créditeurs occidentaux ou du Golfe.
Néanmoins, le déficit budgétaire recommence à plonger dès le début des années 2000. Il oscille alors entre 7 et 9% du PIB – selon les organisations internationales, car selon la Banque centrale d’Egypte, il ne s’agit que d’un déficit d’entre 2 et 5% jusqu’à 2011.

Après 2011, tous les indicateurs s’accordent à noter une chute vertigineuse de la croissance (qui avait pu aller jusqu’à 7% certaines années comme en 2008, en 2010 elle était déjà moins impressionnante, mais à 5% quand même).
L’année passée, depuis le renversement de l’ex-président Frère musulman par l’armée, l’Egypte a beaucoup compté sur l’aide des pays du Golfe, en termes d’argent ou directement de produits pétroliers.

Mais pour résoudre ce problème d’argent, les partis d’opposition, notamment le Dostour, voyaient plutôt une réorganisation de l’appareil d’Etat, une lutte contre la corruption, contre l’évasion fiscale, et surtout l’inverse de ce qui est en train de se produire, afin de maîtriser l’inflation, un contrôle des taux d’intérêt, et enfin essayer de faire baisser les intérêts à rembourser.

Nouvelles taxes et chasse aux billets

S’intéresser aux fraudeurs fiscals, le gouvernement l’a tenté – mais comme toujours, semoncer les homems d’affaires à tendance à leur faire faire leurs valises, et ce n’est pas ce que l’Egypte souhaite non plus.
Certains hommes d’affaires ont d’importants arriérés d’impôts. L’Etat égyptien ne sait pas que faire face à l’une des familles les plus riches d’Egypte, les Sawiris : tantôt elle réclame les sommes dûes par l’un ou par l’autre, tantôt elle trouve un compromis et n’en demande que 50% ou envisage de passer l’éponge… cette année c’est Nassef Sawiris qui est sous le feu des projecteurs, l’année dernière, sous Morsi, c’était Naguib son frère, et en 2011, c’était leur frère Sameh. L’Egypte ne peut pas se permettre de s’aliéner des hommes qui ont les moyens de faire plonger davantage, ou contribuer à relancer, l’économie du pays. Nassef s’était fendu d’une interview à Reuters où il n’était pas tendre envers le gouvernement actuel – heureusement, les charges qui pesaient contre lui ont été oubliées…

Les fils Moubarak par contre sont passés devant les tribunaux et ont été acquittés par la justice en décembre dernier dans l’une des affaires d’abus de pouvoir et de corruption (vente de terrains).

Dans son discours à l’occasion d’une nuit sacrée du Ramadan, lailat-al-qadr, le président-maréchal Sissi compte plutôt sur la manière douce.
Il a rappelé l’existence de fonds dédiés à l’économie égyptienne défaillante: du doux nom de “Vive l’Egypte” pour le dernier, qui vient d’être fusionné avec celui qui célébrait les manifestations du 30 juin 2013 (qui avaient conduit à la destitution et à l’emprisonnement de l’ex-président Morsi):

A plusieurs reprises il prie humblement les riches de contribuer à ce fond pour relever le pays.
El-Sissi dit ainsi vers la fin de son discours dans cette vidéo: « Nous avons un grand problème, les nécessiteux. Et en Egypte et en-dehors d’Egypte, nous avons beaucoup de gens qui ont des moyens. Il faut aider les pauvres, il faut aider les jeunes qui ne trouvent pas de travail et ne peuvent pas se marier et n’ont pas d’espoir. Va-t-on les laisser à leur sort ? S’il vous plaît, Egyptiens d’ici et de l’étranger, l’Egypte a besoin de vous. »

Dans la série des rentrées d’argent inventives, depuis un an le gouvernement ferme et saisit ou gèle les capitaux – les réquisitionne ? des entreprises des Frères, des écoles…

Enfin de nouvelles taxes sur les cigarettes et l’alcool ont été annoncées – les cigarettes importées verront leur prix augmenter de 50%.


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